Dans le charmant village de Nidorfla, 3765 habitants, on a adopté la réforme des rythmes scolaires. À reculons et non sans avoir mené une vaillante bataille. Trêve de plaisanterie a dit Mme Vallaud-Belkacem, les maires récalcitrants seront mis à l’amende. On n’a pas osé la désobéissance civile. Maintenant, on ne peut que déplorer les effets pervers de cette mesure.
Le réveil en douceur et plus tardif du mercredi a été remplacé par la sonnerie stridente et implacable du réveil.
« Il est l’heure de se lever » dis-je à mon petit dernier, frappé de plein fouet par cette mesure destinée à alléger son rythme scolaire. Je suis à peine plus réveillée que lui.
« J’veux pas aller à l’école »
« Et tes copains alors ? Ils vont s’ennuyer sans toi ! » (je sais, c’est vaseux, mais j’ai pas encore bu mon café)
« J’veux quand même pas aller à l’école »
Après les mesures habituelles de supplication, chantage puis engueulade, il se lève. Le mercredi commence fort. Mais je me dis que ça vaut le coup de le lever un jour de plus dans la semaine et d’essuyer sa mauvaise humeur puisqu’il aura des journées moins chargées le reste du temps.
« Je t’ai préparé ton pantalon, habille-toi »
« Nan, j’veux pas mettre çui-là, il est moche »
« Bon alors mets le bleu »
« Nan pas le bleu ! »
Après les mesures habituelles de supplication, chantage puis engueulade, il s’habille.
« Tu veux une tartine de fraise ou d’abricot ? »
« J’veux du Nutella »
« Ben y’en a pas, alors c’est ça ou rien »
« J’veux rien »
Après les mesures habituelles de supplication, chantage puis engueulade, il mange.
« Mets tes baskets, on y va »
« J’veux encore jouer »
« Arrête de me faire parler et mets-les, tes baskets »
« Elles me font mal »
Après les mesures habituelles de supplication, chantage puis engueulade, il s’habille et on part. Je suis à cran, j’ai l’impression d’avoir déjà une journée de travail derrière moi, mais je me dis qu’au moins il aura des matières essentielles ce matin et du coup il sera plus reposé le reste du temps.
Sur le chemin de l’école, je lui demande :
« Tu as quoi ce matin ? »
« Sport »
« Tu as du mal comprendre mon kiki, le matin c’est réservé à l’écriture, au calcul, … »
« Non, la maîtresse elle a dit qu’on fait sport aujourd’hui »
Je récapitule : 1) le mercredi est devenu la même course contre la montre que les autres jours de la semaine, exit la pause qui s’imposait en milieu de semaine 2) l’argument des matières essentielles étudiées le matin ne semble pas résister à l’épreuve des faits 3) certes les enfants finissent l’école à 15h30 mais très peu sont cherchés à cet horaire parce-que – allô – les parents travaillent. De facto, la plupart des enfants restent en collectivité comme avant, ce qui n’allège guère leur rythme 3) les activités extrascolaires ont aussi lieu le samedi matin désormais, on lève donc les enfants 6 jours sur 7.
Comme dirait mon père, si les cons n’existaient pas, il ne faudrait surtout pas les inventer.
:(