Je blasphème pas. C’est que marcher dans le froid, le vent, la pluie, le noir, la nuit, le soir, ça te donne envie de croire en quelqu’un. Pour éloigner le mauvais œil. Ohé là haut ? Vous m’entendez ?

Une marche nocturne au Mont Sainte-Odile dans des conditions Koh-Lantesques à l’heure où les braves gens se décérèbrent tranquillement devant The Voice, crois-moi, ça te donne envie de choisir le bon coach, celui qui va t’éviter la chute du haut des rochers ou le sapin sur la tronche. Vu comment les cimes elles s’agitaient tout là-haut, c’était une probabilité possiblement envisageable. T’aurais cru que le vieux barbu, il se servait de la forêt pour dépoussiérer les nuages. Je blasphème pas ; en vérité, je te le dis. C’est tout.

Contrairement à z’Homme qui sait toujours à quels seins se vouer, j’hésite parfois sur le Saint à invoquer. Mais là, pas l’ombre d’un doute : j’ai prié Odile, fille d’Etichon-Adalric et de Bersewinde (source : wikipedia), Sainte patronne de l’Alsace, de m’épargner même si elle doit en avoir ras la choucroute de tous ces mécréants qui ne la supplient que quand ils ont besoin d’elle.

Bon moi, c’est pas pareil. C’est pas pour faire genre, mais j’allume des cierges dans toutes les églises que je croix-se et je glisse chaque année dans les troncs plusieurs kilos de pièces jaunes. À en faire pâlir Bernadette de jalousie. Pas la Soubirous, hein, mais l’ex première dame de France, qui est aussi très Lourdes et aime les apparitions. Sauf qu’elle est pas en odeur de sainteté, elle. Mais je m’égare, ma foi. Pour le clergé et ses lieux de culte, je suis un mécène anonyme, un sponsor officieux, une bienfaitrice secrète et ça, ma p’tite dame, ça vaut son pesant de protection. Mieux que le bouclier fiscal ou Europe Assistance.

Comme on marchait en file indienne le long du mur païen, je me suis arrangée pour ne pas être à la fin parce que dans les films d’horreur, les derniers sont toujours les premiers … à y passer. Les autres randonneurs restant étonnement placides, je me suis demandée s’ils étaient déficients visuels ou simplement fatigués. Je m’en serais volontiers ouverte à z’Homme s’il n’avait pas été plongé, montre GPS au poignet, dans de savants calculs de dénivelés, tout en mémorisant le parcours pour un futur trail.

Alors j’ai récité des Notre Père, au cas où Sainte Odile serait devenue un peu sourde avec l’âge, et je me suis concentrée sur mes vêtements qui prenaient tranquillement l’eau. Mon K-way Aquamax n’avait sans doute pas été testé waterproof en conditions alsaciennes. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir une pluviométrie de ouf. La sensation de froid mouillé ça te congèle jusqu’aux os. Après ça, une thermos entière de vin chaud, ça suffit plus à remonter la température corporelle.

Par contre, ça dissout complètement la peur. Bien imbibée et entièrement désinhibée, j’ai trouvé le temps charmant, mon voisin aussi. J’ai fini le parcours en titubant et tout le monde a cru que c’était à cause du vent. J’ai eu du mal à articuler et ils se sont dits que c’était le froid. A ce stade de la compétition, limite, le mauvais temps, je le voulais dans mon équipe. C’est te dire.

 

1 commentaire pour “Sainte Odile, priez pour moi”

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