Ma mère a installé deux poules dans son jardin. Jusque là, tout va bien. Sauf que son jardin jouxte le nôtre. Et là rien ne va plus.

Il y a des jours où je me repenche sur mes choix de vie, ceux qui comptent et qui font tout basculer. Parmi mes questionnements du moment, il en est un qui est particulièrement d’actualité : pourquoi, mais pourquoi, ai-je emménagé à côté de ma mère ?

Non parce que tu vois, quand t’as un voisin qui a la lubie des cocottes, tu peux lui conseiller l’origami, ça coûte rien d’essayer. Ou alors tu lui suggères d’installer son poulailler à l’autre bout du jardin, façon polie de lui dire d’aller se faire cuire un œuf ; au pire tu lâches un renard dans le jardin.

Mais quand la voisine c’est ta mère, et qu’elle rallie ses petits-enfants à la cause volaillère, les poulettes ont vite la Cot cot. En plus, ce sont de véritables poules made in Nidorfla, labellisées et primées aux concours avicoles, et quasi aussi sacrées que des vaches en Inde, ohna wetz*. Il est par conséquent formellement interdit d’articuler la moindre critique à l’encontre des gallinacées, véritables coqs en pâte que la mère poule couve d’un regard ému. À croire que c’est des poules aux œufs d’or.

Quand je parle de tordre quelques cous, le grand hausse les épaules. Il s’en fout, du moment que son emploi du temps ne change pas : Ligue Of Legends, manger, LOL, travailler, LOL dormir.

Si j’ai le malheur d’ouvrir le bec, la cadette me demande de quoi je me plains, d’abord, j’ai des œufs tout frais maintenant et « grave trop bons ».

Quant à Pioupiou, il a découvert, émerveillé, l’univers hautement instructif de la basse cour et prépare une thèse sur la vie des poules. C’est une affaire sérieuse : il met son réveil pour être le premier à les faire sortir de leur nichoir et est complètement agité si elle ne rentrent pas tout de suite dès la nuit tombée.

Z’homme reste stoïque : finalement, tant qu’il est le seul coq de la basse-cour, ça lui va.

 

* ohna wetz (alsacien) = sans blague

 

1 commentaire pour “Ça roule, ma poule !”

  1. Lors du premier journal école que j’ai fait avec mes étudiants du Centre de formation des journalistes, mon ancien rédac chef du JDD que j’avais recruté pour diriger ce journal école,avait l’habitude de dire « Ca roule, ma poule » lorsqu’il était satisfait d’un article. Que son auteur soit masculin ou féminin. Certains étudiants s’en étaient offusqués et l’avaient trouvé « vulgaire ». Les cons…

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